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L’incinérateur à Angoulême – la fin?!

Les politiques se réveillent

Pendant presque 2 ans nous avons lutté seuls avec la mairie de Fléac et VSE16. Mais lors de notre dernière AG nous avons pu enfin observer un engouement politique pour la thématique de l’incinérateur. Présence du député M Pilato (actif sur le sujet). Présence de deux candidats à la mairie d’Angoulême. Présence de pas mal d’oppositions dans les municipalités du Grand Angoulême. Donc le vent commençait à tourner, mais nous ne nous attendions toutefois pas à l’enchainement d’articles dans la Charente Libre:

Articles de CL

Tout d’abord une interview faite par le Rédacteur en chef adjoint de CL avec Michaël Laville, maire de Champniers et grand défenseur de l’incinération des déchets. Et plus tard dans la soirée Xavier Bonnefont qui nous fait savoir que l’incinérateur ne se fera pas sur le site de la SNPE.

Visiblement les deux ne se sont pas concertés sur leur communication, mais à l’intérieur de la rédaction de CL on a dû être au courant. Voire s’en amuser?

Les messages de félicitations affluent et un soulagement se fait sentir parmi les détracteurs du projet. Mais analysons les éléments de langage des deux protagonistes en particulier, car faut-il réellement en rester là …? J’ai quelques doutes – nous sommes en pré-campagne des municipales 2026 déjà.

Not in my backyard

Deuxième point, nombreux seront ceux qui ne voulaient pas d’incinérateur là où il a été prévu par Calitom (site de la SNPE). Mais nombreux sont également ceux qui ne sont pas fondamentalement contre la solution archaïque consistant à cramer des déchets ménagers, plutôt que de travailler sur des axes sérieux de réduction, réemploi et recyclage. Même pendant l’AG nous avons pu entendre des définitions très discordantes quant à ce que Zéro Déchet veut réellement dire, certains considérant que les Charentais ne sont déjà pas trop mal en termes de réduction des déchets. En comparaison avec de vrais bons élèves, nous pouvons encore réduire de 2/3 – une marge de progression objectivement significative en vue de la problématique à traiter.

Analysons donc en détail ce que disent nos deux protagonistes politiques qui nous ignoraient ou nous prenaient de haut depuis 2 ans concernant ces sujets:

Interview de Michaël Laville

M Laville cite le SRADDET qui nous pousse à sortir du tout enfouissement. L’argument de l’augmentation des taxes et la fin des capacités de stockage en Charente est avancé. Mais comme remarqué par le journaliste qui conduit l’interview, le SRADDET ne prévoit pas non plus de besoin de capacité d’incinération supplémentaire en nouvelle Aquitaine. D’après M Laville, ce n’est plus vrai, la région vient de revoir sa position … attendons donc la nouvelle position de la région à ce sujet (la région la communique comment exactement?). Ceci-dit, ce n’est pas le SRADDET qui nous pousse à sortir du tout enfouissement, mais une directive Européenne, mais visiblement, cela ne semble pas intéresser Calitom.

Ensuite M Laville vante le projet comme étant ambitieux avec ses 120kt pour les trois régions concernées. Ambitieux, parce qu’on ne réduit pas les déchets mais qu’on incinère beaucoup, dans un magnifique hommage à des pratiques passéistes ? Parce qu’on a le plaisir de voir acheminer à Angoulême les déchets des régions voisines, ce qui présage de belles quantités supplémentaires brûlées ? Voilà qui laisse songeur…

Genèse du projet

Nous apprenons quelques détails sur la genèse de ce génial projet: il y a 2 ans et demi les élus Calitom se sont posés sur la problématique (capacité et redevances) et ont identifié l’incinération comme étant la solution la plus simple à implémenter. Ce processus de décision reste opaque et la seule réponse que nous avons pu avoir de la part de Calitom est:

« Nous n’avons pas fait ça sur un coin de table ».

Michaël Laville, 2024

Nous voudrions avoir les études alternatives menées il y a 2 ans et demi, car à notre connaissance il n’a jamais été question d’autre projet que l’incinération (sous une forme ou une autre). Nous réitérons donc notre principal point de critique, soit le fait de ne pas avoir pris en compte d’autres manières de traiter les déchets ou pistes de réflexion.

Lieu d’implantation

Ensuite M Laville vante les bienfaits de brûler nos couches, barquettes de viandes etc pour produire de l’énergie et la consommer. Il faut être proche d’une agglomération (réseau de chaleur). Nous apprenons également que M Laville a reçu la nouvelle que Thiollet a fermé son usine (ce que nous estimions probable il y a deux ans déjà) – et c’est d’après ses éléments de langage LA principale raison de mettre en question LE SITE D’IMPLANTATION et non le projet dans sa totalité.
Nous nous apprêtons à investir 170M€ en pariant sur la survie d’UNE SEULE entreprise, Thiollet, plus gros client de loin pressenti jusque-là par Calitom. Un mode de pensée pour le moins réducteur et inquiétant. Dans la même ligne, l’implantation de l’incinérateur aurait pu sauver Thiollet car donnerait accès à une énergie plus faible coût – toujours d’après M Laville.

M Laville reconnait très bien également que la campagne des municipales a déjà commencé en envoyant quelques piques à l’encontre de Vincent You pendant l’interview. Il se contredit lui même en disant que le choix de l’incinérateur et son implantation ne sont PAS un choix politique – avant de se corriger pour dire que si, ça en est bel et bien un. . Alors, qu’est-ce qu’un choix politique, en réalité, et qu’est-ce ça implique? Adaptons donc notre vote aux municipales en fonction.

Donc le principal laïus de M Laville est maintenant le suivant :  notre principal consommateur de chaleur a disparu, donc cherchons ailleurs et donc menons une enquête dans la région pour trouver un autre site potentiel. Il y a également un flou sur les réseaux de chaleur urbaine qui sont dans les mains de l’agglomération depuis peu – de nouvelles aventures à venir, sans doute. Ces réseaux, inexistants à l’heure actuelle, feront-ils partie de la nouvelle proposition que Calitom nous sortira de son chapeau?

Un aspect sur lequel M Laville a tout à fait raison est de dire que ce n’est pas la faute de Calitom si on a des déchets à traiter. Nous produisons les déchets – nous tous. Nous en avons conscience (en tout cas une partie d’entre nous) – mais nous demandons aussi aux élus de Calitom de réellement chercher des alternatives à l’incinération, les travailler sérieusement et peser le pour et le contre de chaque proposition. Jusqu’à aujourd’hui, nous n’avons rien vu de tel.

Car si on croyait aveuglement M Laville:

Aucun élu Calitom ne prendra une décision qui nuira à la santé de la population

Michaël Laville, 2025

Nous voilà rassurés. Néanmoins, nous avons vu depuis 2 ans comment sont traités nos analyses scientifiques nombreuses, le principe de précaution, ainsi que les analyses de VSE16 se basant sur des articles internationaux fait l’objet d’une revue scientifique rigoureuse. Le science-bashing est certes à la mode dans certaines parties du globe en ce moment. Malheureusement, il semble aussi en vogue par ici.

Dans ce sens, l’intervention d’un des nombreux VP de Calitom lors de l’AG du COCIP il y a 2 semaines a donné le ton sur le dénigrement de l’avis médical. Sur les PFAS, une étude « très sérieuse », mais sécrète est en cours à Lyon. La base d’une analyse scientifique est la reproductibilité et la transparence – nous n’y sommes donc clairement pas. D’après M Laville, les PFAS sont des nouveaux polluants. Si M Laville s’intéressait réellement à ce que nous nous efforçons à communiquer ensemble avec VSE16 il aurait compris que ce ne sont pas du tout de nouveaux polluants. Les PFAS ont été bel et bien émis par les vieux incinérateurs, nous les avons enterrés sous les routes et surprise nous les trouvons maintenant dans nos nappes phréatiques. PERSONNE n’a la liste complète et exhaustive des molécules ni leur concentration après l’incinération des déchets. Que ce soit à 800°C, 1100°C ou 1400°C. De plus, nous ne testons qu’une infime fraction de ces molécules pour déterminer leur concentration. Il est donc tout à fait logique qu’on en découvre des « nouvelles ». M Laville, un petit scoop – les PFAS ne seront pas les derniers …

Les picogrammes, c’est tout petit

Une partie particulièrement navrante de l’interview porte sur le dosage des dioxines issues de l’incinération. Il parle d’émissions en picogrammes. Et comme M Laville n’a pas l’habitude de ces unités, il nous démontre que c’est 10^-12, donc tout tout petit. Nous invitons M Laville à lire ma contribution faite lors de la concertation publique. On y parle de la toxicité, les taux et pg/kg de masse corporelle … ce fameux picogramme y est encore. Ce n’est pas parce qu’une substance est faiblement concentrée qu’elle n’est pas toxique. Si M Laville s’intéresait un tant soit peu à la problématique des perturbateurs endocriniens il saurait également qu’un cocktail de plusieurs substances à très faibles doses peut avoir des effets néfastes décuplés. Probablement peu sur lui-même, mais ses enfants et petits enfants avec certitude. Ceci a été très bien vulgarisé par le Dr Sylvia Malès du collectif VSE16, mais de très nombreuses études confirmées existent démontrant les impacts.

En dernier M Laville nous reproche de toujours oublier les déchets des professionnels. Il suffit de les inclure dans les projections / mesures de manière transparente, tant sur leur quantité que sur leur nature. Qui serait le mieux placé pour communiquer cette information? Nous, les citoyens? Ou Calitom, dont M Laville fait partie?

L’outil

Michael Laville, 2025

L’outil, comme M Laville appelle le projet d’incinérateur à plusieurs reprises coutera finalement jusqu’à 170M€ d’après les estimations actuelles … rappelons, il y a 2 ans nous sommes partis de 100M€. Nous tracerons la trajectoire budgétaire pendant les années à venir, ne vous inquiétez pas.

En outre M Laville nous carotte avec la TGAP que nous risquons de payer, comme 300€ en Savoie actuellement. Avec l’UVE nous paierons seulement 80€. Nous vérifierons ce chiffre le moment venu, M Laville. Il va de soi qu’il convient de comptabiliser également l’investissement nécessaire afin de traiter les déchets sur les 40 années à venir, car l’incinérateur ne sera probablement PAS payé par un prestataire privé, mais par l’agglomération, le département, la région … le contribuable. Le fait de dire que nous paierons 80€ à terme pour la maintenance, c’est occulter les autre coûts associés.

Vous risquez plus à respirer votre barbecue

Michaël Laville

J’ai personnellement adoré cette remarque et je me suis tout de suite imaginé toute la population angoumoisine allumer un barbecue et mettre leur tête sous la cloche H24 7jours sur 7. Nous nous heurtons ici au principe de durée d’exposition – l’incinérateur fonctionnera non-stop durant 40 ans au maximum de ses capacités. La comparaison avec un barbecue est donc irrecevable.

Organisation d’un débat

Pour terminer, M Laville réagit suite à la question du journaliste lui demandant pourquoi il n’accepte pas un débat public avec toutes les parties prenantes, y compris VSE16 et nous, COCIP. M Laville rappelle qu’il nous a reçu y compris les autres. Nous nous rappelons très bien de l’entrevue et pensons qu’une autre manière plus respectueuse de l’avis contraire et argumenté serait bienvenu dans ce « débat ». Lors de l’AG la tenue d’un débat a été proposé – nous tâcherons d’aller dans ce sens.

En attendant – nous sommes suspendus aux études de Calitom pour trouver un autre site (ou pas – réseau de chaleur) et comme par hasard nous seront fixés courant 2026 – avant ou après les élections municipales? On se le demande bien.

C’est dans ce contexte qu’il est intéressant d’analyser l’intervention de Xavier Bonnefont, maire d’Angoulême, le même jour que l’interview de M Laville

Xavier Bonnefont

Il ne peut pas y avoir d’UVE sur le site de la SNPE.

Xavier Bonnefont, 2025

Nous avons passé les deux dernières années à interpeller M Bonnefont et M Mounier à de très nombreuses reprises lors de différentes réunions publiques, manifestations, courriers, communications. Nous avons TOUJOURS, sans exception, été bottés en touche sur la question de l’incinérateur sur le site de la SNPE.
Et là Xavier Bonnefont explique qu’il ne peut pas y avoir d’UVE sur le site de la SNPE car ça ne fait pas partie du SCOT élaboré dans sa version initiale en novembre 2023.

Y a-t-il quelque chose qui cloche, là? En novembre 2023 Xavier Bonnefont aurait pu parler à son collègue M Laville pour dire: « Hey, écoute c’est pas possible, car pas prévu ». Pourtant, le projet est resté sur la table. L’argumentation donnée n’est donc en rien crédible voire audible pour nous qui avons passé notre temps à exiger de vraies alternatives à ce projet pendant 2 ANS.

L’intervention de Xavier Bonnefont se prête donc à une grand marge d’interprétation.

Soit, il ne savait pas comment se positionner et sait très bien que c’est un sujet sensible, donc il retarde une quelconque décision et s’est même déchargé de cette responsabilité envers le département récemment. L’allusion au SCOT ne serait-elle pas une excuse bienvenue pour calmer l’inquiétude de son potentiel électorat pour 2026 ?

S’il est compliqué de changer le SCOT, comme l’a dit le maire après avoir été interrogé sur ce point, cela n’est en rien impossible. Gageons que cela n’arrivera pas avant 2026. Au final, il semblerait que nous soyons face à une absence de décision et une temporisation, plutôt qu’à un non définitif. Et d’ailleurs, Xavier Bonnefont ne dit en rien que l’incinérateur ne se fera pas !

Conclusion

Nous sommes donc dans la situation où il y a un certain soulagement initial suites à ces nouvelles, mais en lisant entre les lignes, rien n’est fixé, joué, déjoué aujourd’hui. Nous allons rentrer dans une phase de pause pile pour la campagne des municipales 2026, car ce sujet jouera en défaveur de n’importe quel candidat choississant de le porter. A nous de faire de ce sujet un thème important des élections à venir , au risque de voir l’incinérateur nous promettre de nouveau ses belles colonnes de fumée passée cette période – car nous le savons déjà, nous serons sinon bottés en touche car – RAS on est en étude.

J’ai donc une petite proposition à vous faire Messieurs les élus. Si vous alliez passez des vacances ensemble à Trévise pour rendre visite à Contarina? Ca donne envie, non?