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Alternatives à l’incinération

Un aspect particulièrement révoltant de la démarche de Calitom et certains élus du grand Angoulême est qu’aucune alternative à la construction d’un incinérateur est proposée, travaillée ou communiquée. A écouter toutes personnes un peu actifs autour du sujet c’est:
– compliqué
– peu de gens s’y connaissent (mais prennent tout de même des décisions)
– de toute façon il faut bien faire quelque chose avec les déchets
– brulez, brulez, mais pas chez moi
– blablabla j’entends rien de ce que vous dites

Où sont les jeunes?

Comme souvent il manque de l’envie du changement, du nouveau, la curiosité vers l’inconnu, sortir de sa zone de confort de la part de tout le monde qui gravitent autour du sujet (n’incluons pas quelques militants de Zero Waste peut-être). J’ai assisté à l’assemblée général du COCIP qui a eu lieu cette semaine – et je dois dire que j’ai été de nouveau frappé par 2 choses:
1: La moyenne d’âge des personnes actifs contre ce projet d’incinérateur est très élevé, à en croire que cela ne concerne pas les étudiants, jeunes parents ou ils ne sont pas suffisamment informés. Ne me méprenez pas, j’ai un profond respect pour les personnes qui s’investissent contre ce projet activement, je suis juste frappé par l’absence de jeunesse, et je ne suis pas le seul.
2: L’intervention de notre doyenne (ironique, n’est-ce pas?), Janine Ligonat. Je n’ai pas ses mots exacts, mais elle a clairement fait connaître son avis très lucide, expérimenté et logique que toute autre approche que la REDUCTION MASSIVE des déchets, un changement important des comportements et le recyclage n’est pas viable sur le court, moyen et long terme sur notre planète. TOUT EST DIT!

J’aurais naturellement attendu ce genre d’avis et discours d’un jeune activiste, mais non, c’est la sagesse qui a exprimé bien mieux que moi ici un raisonnement logique et implacable.

Malheureusement, dans notre monde actuel la logique économique court-termiste prime toujours par rapport à un raisonnement sain, prévoyant et long-termiste. Un des meilleurs exemples de cela est le fait d’essayer de vendre un incinérateur de déchet comme source d’énergie renouvelable et unité de valorisation énergétique. Strictement, l’énergie issue d’un incinérateur est une énergie de récupération dont la moitié est considérée comme étant renouvelable (ce qui est discutable). C’est tout aussi heureux que de changer le nom de Total en Total énergies et ajouter un peu de vert dans le logo. On appelle ce genre d’approches du « Greenwashing« .

Que font nos élus?

Le problème est que très peu de personnes semblent s’intéresser réellement à la gestion des déchets et comment l’améliorer parmi les élus composant Calitom. Quelques informations ont été communiqués lors de l’assemblée mais la tribune de l’opposition de St Yrieix en dit long sur les pratiques à l’oeuvre parmi nos représentants. Je vous laisse apprécier la dernière page du magazine.

En tant que contribuable lambda et non-élu on peut se sentir un peu désemparé – et à l’heure actuelle je ne vois pas qui, ni comment une alternative à ce projet pourra voir le jour à Angoulême – car ça manque d’investissement, volonté et vision, très très clairement. Est-ce qu’il est normal pour un établissement public de favoriser des entreprises privées en leur mettant à disposition des outils industriels clairement surdimensionnés? Est-ce qu’il est normal pour un syndicat comme CALITOM de se comporter lui-même comme une entreprise cherchant à maximiser ses profits, au détriment de la qualité de vie des riverains de ses installations et de ses obligations réglementaires en termes de performances environnementales ?

Est-ce que c’est le role de la population de montrer d’autres chemins? J’ai bien peur que ceci s’impose ici. Attention, je ne dis pas que ce qui suit sera le modèle à suivre, je veux seulement réveiller les consciences. Si nous ne sommes pas suffisamment inspirés (et clairement nos élus ne le sont pas), essayons de voir ce qui se fait ailleurs.

Kamikatsu – un exemple bien réel

Alors regardons un exemple du monde réel où quelques personnes ont eu une vision et une volonté pour transformer la gestion des déchets – suite à des contraintes bien plus fortes que les nôtres.

Il y a pléthore d’articles sur une petite commune japonaise nommée Kamikatsu qui se situe sur l’île de Shikoku. Kamikatsu n’a que 750 foyers (un peu plus de 1000 habitants), donc en rien comparable avec Angoulême (histoire de couper court aux mauvaises langues). Un petit article gouvernemental (français) donne une petite vue d’ensemble du projet. Voici les grandes lignes:

  • Les gens brulaient à ciel ouvert leurs déchets, ou les jettaient dans la montagne avant
  • La commune a commencé en 1994 à implémenter ses premiers projets de recyclage a fait une étude sur la composition des déchets
  • Sous contrainte d’agir vite ils ont construit 2 petits incinérateurs qui ont causé des problèmes de pollution aux dioxines et ont du fermer
  • La ville se tourne activement vers le recyclage et déclare en 2003 sa volonté de ne plus avoir recours à l’incinération ou l’enfouissement à l’horizon de 2020.
  • Un volet très fort autour de l’éducation écologique a été implémenté
  • Cette ville a réussi à atteindre un taux de recyclage de 80% (question pour un champion – on en est où, nous et quels sont les objectifs européens?)
  • Les 20% restants ne sont pas atteignables sans actions à la source de la production des déchets, souvents externes à la commune – mais pas impossibles

Comme beaucoup de communes, Kamikatsu croule aussi sous le plastique et tout n’est pas parfait, loin de là. Un article intéressant de reporterre peut être consulté ici sur les limites du modèle. Mais ce modèle montre que beaucoup plus de choses sont possibles quand on y investit et on réfléchit.

Personnellement j’adore (ironiquement) le dernier paragraphe de cet article de la diréction générale du Trésor Français, le voici au complet:

Le modèle de recyclage de Kamikatsu s’avère efficace et économiquement profitable et peut agir comme démonstrateur auprès des gouvernements locaux japonais. De nombreuses municipalités viennent s’informer des politiques zéro déchet mises en place à Kamikatsu, et l’émergence de nouvelles politiques au sein de différentes régions pourrait accélérer la transition de l’archipel vers une économie plus circulaire. Cependant, la situation est particulièrement complexe au Japon puisque la plupart des villes ont investi des sommes colossales dans des incinérateurs high-tech, et n’envisagent pas de se détourner de l’incinération. Dans ce contexte, un changement de paradigme orienté vers le recyclage semble compromis.

https://www.tresor.economie.gouv.fr/Articles/2019/05/07/kamikatsu-ville-pionniere-du-zero-dechet-au-japon

Nous sommes exactement dans le contexte compliqué souvent mentionné par des associations Zero Waste et autres travaillant sur le sujet. Si on investit massivement dans un incinérateur on doit le rentabiliser et donc on incite à continuer comme toujours et ce ad vitam eternam. La construction de ces équipements va donc empêcher toute réorientation de la stratégie de gestion des déchets pendant la durée de leur amortissement.

D’autres exemples existent depuis, comme le programme contre la pollution plastique à Kanagawa. Encore une fois, tout n’est pas fait, tout n’est pas parfait, mais où il y a une volonté, il y a un chemin et c’est aujourd’hui que l’avenir de la gestion des déchets futurs d’Angoulême et plus globalement de la Charente se décide.

Que pourrait-on faire avec 110M€ (ou 200M€ probables en coût réel pour l’incinérateur) à la place de construire un incinérateur? Probablement beaucoup plus qu’une commune de 1000 habitants au Japon qui a déjà montré le chemin sur beaucoup d’aspects avec moins de moyens.

Qui pour porter une projet alternatif pour notre avenir? Merci de vous faire connaître!